Pourquoi faut-il restaurer?
Pourquoi faut-il restaurer la basilique Notre-Dame du Saint Cordon ?
Qu’on le veuille ou non, le miracle (pour les uns) ou la légende (pour les autres) du Saint Cordon est intimement lié à l’histoire de la ville de Valenciennes. Il a été démontré (Félicien MACHELART in Valentiana septembre 2009 – Valenciennes et le Saint Cordon) que le Magistrat de Valenciennes organisait la procession annuelle dès le XIIème siècle en y associant l’ensemble des corps constitués de la cité dans un ordre précis : ouvrant la route, les cavaliers puis les corporations ou mestiers (une cinquantaine) avec leurs bannières, puis les enfants pauvres des écoles et orphelins, puis les ordres religieux mendiants avec chasses et reliques, le héraut de la Ville, les confréries, les compagnies bourgeoises armées, les Royés avec la châsse du Saint Cordon, les reliques provenant des abbayes voisines, le clergé de la ville, le magistrat et le public.
Cette manifestation d’unité communale rassemblant pauvres et riches, profanes et religieux, hommes en armes et musiciens, hommes de tous métiers et notables, s’organisait autour du sanctuaire dédié au culte marial : Notre-Dame la Grande bâtie aux XIème et XIIème siècles et détruite après la Révolution, puis l’actuelle Notre-Dame du Saint-Cordon construite de 1852 à 1864.
Ce bâtiment du Second Empire marque incontestablement la physionomie de la ville et fait partie du paysage par son haut clocher (visible depuis l’autoroute Paris-Bruxelles) et de sa masse émergente des toits (depuis le carrefour de Romainville et Marly). Son style néo-gothique lui a été reproché mais il s’agit là d’un témoignage de son époque et du contexte dans lequel il a été édifié. Ses qualités intérieures sont réelles : grande hauteur de voûtes (26,80 m), vaste nef, déambulatoire desservant trois chapelles, clôture de chœur, belle lumière à l’intérieur, décoration intérieure complète et cohérente, orgues de premier plan (classés Monuments Historiques et restaurés par la Ville).
Deux questions sont fréquemment posées :
Doit-on sauver la basilique parce que c’est une église ?
Non pas nécessairement. Pas plus qu’il ne faut la détruire parce que c’est une église.
La vocation religieuse de ce bâtiment est un fait historique. Il semble naturel que le culte catholique puisse continuer à y être pratiqué si les fidèles le souhaitent (et pourquoi pas redevenir un lieu de pèlerinage). Mais ce bâtiment présente en lui-même un réel intérêt (inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques) et peut également remplir une fonction culturelle (salle de concert, musée, centre patrimonial…).
Sa démolition ou «déconstruction» alors qu’il constitue un lien direct avec l’histoire et qu’il participe à l’identité de la ville serait une erreur. Valenciennes n’a rien à gagner à perdre sa mémoire…
Doit-on dépenser un argent considérable à restaurer un bâtiment?
L’aspect financier est souvent agité comme un épouvantail alors même qu’aucune étude sérieuse et détaillée n’a été rendue publique et accessible à la discussion.
Certes son état nécessite un lourd investissement: remplacement de la pierre blanche à l’extérieur, nettoyage complet de l’intérieur. Le budget à prévoir est à la mesure de la tâche. Mais n’est-ce pas le cas de tout bâtiment d’importance? N’est-il pas envisageable de planifier sur une longue période et d’élargir les financements?
Après avoir été si riche architecturalement parlant, Valenciennes a perdu ses fortifications, ses abbayes, couvents, églises, chapelles, son beffroi, son théâtre et tout son centre historique.
La conservation et la mise en valeur de ce qui a échappé aux vicissitudes de l’histoire doivent être assurées pour nous-mêmes et les générations futures.
Jérôme Guilleminot